Orthographe contaminée

Il arrive à tout le monde, moi la première, de faire des fautes quand on écrit trop vite ou qu’on oublie de se relire. Mais cette semaine, dans des courriels que j’ai reçus de même que sur des blogues, je suis tombée à plusieurs reprises sur une erreur qui m’a fait sursauter. J’ai donc pensé publier ce petit billet d’intérêt public, en cette grande saison de microbes et virus.

Faites attention de ne pas écrire que vous êtes septique, quand ce que vous voulez vraiment dire c’est que vous êtes sceptique. Les gens autour de vous pourraient mal réagir.

J’espère que je n’ai pas fait de faute en écrivant ce billet, sinon je sens que je vais en entendre parler…

Coming next

So you can’t wait for your favorite tv shows to start airing again?

While you wait, you can read the script for the new show called: Lost House 24.

I really love the part where Chloe manages to sync up to the hatch computer. Oh, and the fact that Jack Bauer gets cell phone service on the island.

Of course he would.

De décembre à octobre

De retour au travail après une pause pour le temps des fêtes pendant laquelle j’ai vraiment décroché de mon quotidien – et je veux dire VRAIMENT décroché. J’ai même voyagé dans le temps. En fait, décembre 2006 aura été pour moi octobre 1970. Plus tôt en 2006, Blork et moi avions regardé Les Ordres de Brault, un film qui m’avait fait une forte impression quand je l’avais vu pour la première fois alors que j’étais enfant. L’automne dernier, j’avais enregistré la télésérie produite par la CBC sur la crise d’octobre, mais je n’avais pas eu le temps de la regarder. Pendant 3 soirées de décembre, Blork et moi sommes passés à  travers les 8 épisodes de la série, provoquant entre nous de nombreuses discussions et générant une grande quantité de recherches de ma part sur le Web pour approfondir certains détails. Comme plusieurs l’ont rapporté, c’était étrange de voir des acteurs québécois (jouant des felquistes) échanger en anglais entre eux. Malgré tout, au bout de deux épisodes, j’ai bien « assimilé » (heh heh) le concept et ça ne me dérangeait plus. Dommage tout de même que Radio-Canada n’ait pas coproduit cette série bien écrite et très bien jouée, d’autant plus qu’on y retrouve d’excellents jeunes acteurs québécois qu’on ne voit pas souvent à la télé.

La fiction doit prendre des raccourcis, bien sûr, et la série m’a rendue trèss curieuse quant à certains détails historiques et politiques, détails que je me suis empressée de chercher sur le Web. Je m’y suis perdue pendant de longs moments, la biographie d’un felquiste me menant à celle d’un éditeur, dont les récentes lettres publiées dans les journaux me menaient à  un politicien, dont les frasques me menaient à m’informer davantage sur la naissance de son parti… Vous voyez le portrait. Au bout d’un long moment, je levais les yeux et j’avais peine à  croire que nous étions en 2006 et que mon chum ne portait pas de moustache et de chemises à gros collet.

Je me suis ensuite plongée dans la lecture du livre Le personnage secondaire, écrit par le réalisateur et producteur Carl Leblanc, publié chez Boréal l’automne dernier. En 2004, Leblanc a réalisé un documentaire sur James Richard Cross, l’attaché commercial de la Grande-Bretagne qui a été kidnappé par la Cellule Libération en octobre 70. J’ai été absolument, complètement captivée par ce livre dans lequel Leblanc tente de redonner à ce « personnage secondaire » de la crise d’octobre toute la place qui lui revient dans l’Histoire, non pas en tant que symbole mais en tant qu’homme. (Malheureusement, je n’arrive pas à mettre la main sur le documentaire qui semble introuvable.) En plus d’être captivée par ce point de vue inédit sur la crise d’octobre, j’ai suivi avec énormément d’intérêt les questionnements créatifs et éthiques de l’auteur quant à son travail de documentariste. J’ai aussi apprécié d’un oeil complice ses descriptions presque douloureuses de ses rencontres avec les institutions qui financent le cinéma d’ici…

Parce que les producteurs adorent ce genre d’histoires, mon travail de scénariste m’amène souvent à plancher sur des textes « basés sur une histoire vraie » et ceux qui sont passés par là connaissent les complications que ce type de récit peut entraîner. Les journalistes qui doivent rapporter des propos ont aussi, bien sûr, ce type de dilemme à vivre. Comment être véritablement fidèle aux propos, à l’esprit, au sentiment? Est-ce que toute interprétation est une trahison? Comment illuster la mémoire, le temps qui passe? Leblanc se promène sur la côte en Grande-Bretagne avec un ex-otage qui a maintenant presque 80 ans et il se questionne.

Le vieil homme qui vacille dans le vent près de moi connaît-il si bien l’otage de 70? En le regardant, je me dis qu’il y a toujours de la fiction dans le documentaire, comme de l’eau dans le gaz, et que son drame que je vais livrer à la mémoire collective, il nous faudra le reconstituer avec des mots, des archives, une musique, et qu’il deviendra vite une – j’allais dire pure – invention. Oui, bien sûr, il faudra le réinventer. Quelles traces perceptibles a t-il-laissées? Oui, à  partir de quand cessons-nous d’être celui qui tricha, qui souffrit, qui pleura, qui trompa, qui résista, qui se dépassa, qui fit dans son froc… À partir de quand cessons-nous d’être ces actions nobles, ces gestes infâmes?

Leblanc décrit aussi le poids du regard de certains de ses « compatriotes » québécois les plus nationalistes face à son choix de sujet. Pour eux, faire un film sur Cross représente une forme de provocation. On ne touche pas au Québec à la mythique crise d’octobre, du moins pas de cette manière, pas sous cet angle. Comme le dit la quatrième de couverture: « Contre les idées, les individus ne font jamais le poids. À moins qu’on cesse de les imaginer pour enfin, vraiment, les rencontrer. »

Je me suis beaucoup reconnue dans les propos de Leblanc, dans ses questionnements, dans sa volonté de scruter le passé par la petite histoire, en refusant de la dépersonnaliser. J’ai pris plaisir à écouter ce type de voix modére qu’on entend peu ici quand il est question de politique. J’étais trop jeune en 70 pour me rendre compte de ce qui se passait dans ma province. Au cours des années qui ont suivi, on m’a raconté : les gens arrêtés sans raison, l’armée dans les rues, l’arrogance de Trudeau, mes profs d’université enfermé sans avoir droit de parler à un avocat. La vision que j’avais gardée des événements était vague, quelque peu romantique, avec une touche de théorie de la conspiration. C’est la vision la plus commune, du moins chez ma génération post baby-boomer. Pendant des années, il ne m’est jamais venu à l’esprit de questionner cette interprétation.

Ces visionnements et lectures m’ont rendue très songeuse pendant les fêtes. Je n’avais pas repensé depuis longtemps à la jeune militante que j’étais à 20 ans, avec ma carte de membre du Parti Québécois, mes quelques soirées de porte à porte à distribuer des dépliants avec des amis plus militants que moi, à  aller écouter Pierre Bourgault lors de son passage à mon université, à suivre le cortège funèbre de René Lévesque et me tenir debout devant l’église pendant ses funérailles. Qu’est-ce qui s’est passé dans ces 20 années? Comment ma pensée a-t-elle évolué loin de soucis politiques, loin de ce que je croyais être? Où sont mes croyances, vers quoi se sont-elles tournéees? Ai-je vraiment fondamentalement changé?

Encore une fois, les mots de Leblanc ont esquissé une réponse dans laquelle je me suis reconnue.

Ce « contexte » des libérations nationales était celui de la grande peur que toute cette Histoire d’humains ne soit rien de plus qu’une histoire et non l’Histoire, le Destin, le Sens… Débarrassés de Dieu, nous avons abaissé le niveau de sa transcendance pour nous en approprier le lustre.
Je voudrais moi aussi dire « Non! » À cette absence de rêve, au matérialisme dégradant, mais je préfère dire oui à  la vie imparfaite. Et je me sais irrécupérable pour la Révolution nationale. J’ai vécu deux pertes de foi. En Dieu et en la Nation. Il me reste quelques individus à chérir comme représentants du genre.

Moins de certitudes, mais le sentiment d’avoir une base plus solide à ma vie. Paradoxe de l’être qui avance, qui vieillit.

Reste donc quelques individus à chérir. Et des histoires (avec un petit h) à raconter.