I have an idea for a movie

« So I hear that you used to write movies ».

I lifted my fingers from the keyboard.

« What was that? » the nurse said. « You got gas? » I’d quietly groaned because I knew what was coming: an idea for a movie. I’d heard them for most of my adult life: from cabdrivers, barbers, doctors, anyone who’s got you trapped for a while, like this dentist in Van Nuys who once tried to get me jazzed about writing a movie about the romance of dentistry, this as he was sharpening a #6 drill and with my mouth propped open as I stared with bulging eyes at the dental horror photos that were plastered all over the wall in front of me.

« Tell me, what’s your idea? » I asked the nurse miserably.

« Yeah, all I need is a writer to help me with the technical stuff, » I heard her say. I turned and faced her. She was standing with her arms akimbo.
« What technical stuff? » You mean the screenplay format? »
« No, the words, » she said.

I wanted to bury my forehead in my hand.

From the novel Crazy, by William Peter Blatty.

Des intentions de génie

Billet très intéressant sur le blogue du scénariste John August: un étudiant ou un professeur de cinéma nommé Shay lui demande de valider certaines de ses thèses quant aux intentions du scénariste et du réalisateur de Big Fish. John August lui explique que son interprétation du film a peu à voir avec les intentions de ses artisans (du moins d’un point de vue conscient).

Academia teaches us to ask questions like Shay’s — and generally, to answer them ourselves. So we find parallels and influences that make sense on paper without worrying too much about whether they’re actually true.

En s’appuyant sur un exemple d’une analyse vidéo du film The Shining, John August fait ensuite la démonstration de la genius fallacy, cette tendance des académiciens du cinéma à dégager d’une oeuvre des intentions qui n’existent pas et d’y voir là du génie. August explique que plusieurs des décisions prises par les cinéastes sont en fait issues de considérations pratiques: nécessité de donner plus de lumière à une scène, limitation du budget qui force à utiliser plusieurs locations pour créer un lieu, etc.

Il conclut:

The Shining is a great movie. Kubrick was a great director. […] Observe how Kubrick isolates his characters by placing them in vast sets and landscapes.
But don’t obsess about which way the freezer door swings. By making too much of too little, you miss out the bigger picture.

Il n’y a pas que les académiciens qui tombent dans le piège du genious fallacy. Je vois régulièrement ce genre de prêt d’intention dans le cadre d’articles publiés par des critiques de film. Parfois les intentions qu’on prête aux cinéastes sont nées de l’enthousiasme d’un critique face à une certaine Å“uvre. Dans d’autres cas ils font partie d’une perspective négative sur le travail d’un des artisans du film.

Vous me voyez venir? Étant scénariste, je suis particulièrement étonnée de voir les intentions qu’on prête parfois aux scribes, d’autant plus que la grande majorité des critiques ne lisent jamais de scénario! Quand on connaît un tant soit peu la production cinématographique, on sait que la pré-prod et le tournage peuvent amener à modifier grandement un texte: producteur qui veut y aller de son côté créatif sans prévenir le scénariste ou qui doit ajuster quelque chose pour des raisons budgétaires, réalisateur qui interprète le texte à sa façon bien particulière, acteurs inspirés à faire des changements en plein milieu d’une scène, etc. C’est ça le cinéma: un travail hautement collaboratif réalisé par une équipe dont les membres n’ont pas toujours la même vision. Et même quand, par bonheur, dans le meilleur des mondes, cette vision est partagée par tous, elle est appelée à changer à toutes les étapes de la production.

Je n’essaie pas de dire que l’analyse cinématographique n’a aucune valeur. J’ai d’ailleurs débuté des études de doctorat dans ce domaine (que je n’ai pas terminées). Après des années d’analyse plan par plan du Cuirassé Potemkine, de La Jetée, de l’Année Dernière à Marienbad, de Lady in The Lake et de The Birds, je me suis rendue compte que l’appel de la création était plus fort que mon désir de soumettre mon cerveau à des exercices de haute-voltige analytique, aussi fascinants fussent-ils. Je n’étais pas à l’aise non plus avec l’idée de devenir professeur de cinéma sans avoir jamais collaboré à un long-métrage. J’avais l’impression que mon enseignement se retrouverait limité par mon manque d’expérience sur le terrain, et ce, même si j’étais restée confinée à des domaines comme l’histoire du cinéma ou la théorie cinématographique.

Mon apprentissage et mon perfectionnement du métier de scénariste est lent et mon parcours n’est pas toujours linéaire. Je travaille parfois sur des projets dont l’étudiante en cinéma que j’étais se serait sûrement moquée. (Ah, le luxe de la droiture intellectuelle de nos 20 ans!) Mais je me rassure comme je le peux en me disant que mon parcours est profondément ancré dans la réalité d’une industrie qui oscille depuis ses débuts entre l’art et le divertissement. C’est une justification qui demande elle-même un certain travail de haute-voltige intellectuelle, j’en conviens ;)

Pitch

Ce n’est pas donné à tout le monde de savoir faire un bon pitch mais c’est peut-être encore plus difficile pour les scénaristes, tout habitués qu’ils sont à travailler seuls dans leur coin comme des enfants sauvages. La meilleure école pour moi ça a été de faire de la télé: il faut être à la fois calme et animé, projeter sa voix (mais pas trop) et sourire en parlant. Croyez-moi: il suffit de se regarder à la télé le lendemain d’un tournage pour avoir très très envie de s’améliorer!

Il existe plusieurs ressources en ligne sur l’art de présenter son idée de scénario, mais une excellente façon d’apprendre à faire de meilleur pitch c’est de regarder les autres en faire. Téléfilm Canada a récemment mis en ligne la séance de Pitch this présentée dans le cadre du TIFF 2010. Ça vaut la peine de regarder les auteurs et réalisateurs se démener pour vendre leur salade, certains avec plus de succès que d’autres…