10 ans!

Le 5 février 2002, je démarrais un blogue via Blogspot pour tester cet outil de publication en vue d’un article que je m’apprêtais à écrire pour un magazine suisse. J’ai aimé. J’ai continué.

Nous voici donc, mon blogue et moi, 10 ans plus tard. Bien des mots et des rencontres derrière nous et quelques rides en plus…

Le règne du blogue. La mort du blogue. Le retour du blogue.
Tout est cyclique.

J’ai commencé à écrire ce blogue pour moi, en ne pensant pas attirer bien des yeux ou des clics. Si je continue avec ces fictions instantanées (comme avec d’autres types de billets), c’est avec la conscience que je dois d’abord et avant tout trouver la motivation en moi-même. Les réseaux sociaux et la facilité des échanges qu’ils apportent laissent peu de place aux grands élans personnels de publication. Qui a le temps de lire plus de 140 caractères à la fois? Qui a envie de commenter quand on peut simplement cliquer « like » pour signifier son approbation, sa présence, son amitié?

C’est un constat plus qu’une condamnation. Je serais mal placée pour juger puisque je participe moi-même activement à plusieurs de ces réseaux. Après toutes ces années de publication en ligne, j’ai appris que les modes, comme les gens, vont et viennent. Les attentions se dispersent, s’essoufflent, cherchent à se reconcentrer, puis se dispersent de nouveau…

Vous êtes encore quelques fidèles à aboutir ici sur une base régulière, que ce soit parce que vous suivez toujours vos fils RSS ou parce que je vous ai fait signe via Twitter ou Facebook. 10 ans, c’est rien. C’était hier. Votre présence? Vos commentaires? Ah ça, ce n’est pas rien! Pour ces années d’attention et d’échanges, merci. On a beau vouloir écrire pour soi, on est toujours heureux de ne pas se savoir seul.

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Instantanées #3

To celebrate the 10th blogging anniversary of ni vu ni connu, I’m trying out a new feature: Fictions Instantanées. These very short stories, delivered via text or video, are based on pictures taken by me (or this guy), often times via Instagram. The frequency of publishing has yet to be determined (which means that I’m not willing to commit to anything). It’s a way to give some life back to this blog, with which I’ve had a great ride in the last 10 years, but somewhat neglected in the last three (damn you, social networks). It’s also a way to get back in touch with a more free and spontaneous type of writing, something that screenwriting (my « day » job) doesn’t allow for.

I hope you enjoy it! And thanks to those of you who have kept on visiting this blog over the years. You’re awesome and you’re a lot of fun to have around.

I suggest watching this video in a bigger version (here) or in full screen mode. It looks better and it makes the dialogue on the screen easier to read. You can also click on the arrows at the bottom right of the video to make it larger.

I dreamed about you last night from Martine on Vimeo.

Instantanées #2

Note: Pour fêter son dixième anniversaire et pour justifier son existence, le blogue ni vu ni connu s’offre une nouveauté: des fictions instantanées. Inspirées par des photographies, la plupart du temps saisies par l’auteure de ce blogue, ces fictions seront publiées à une fréquence indéterminée (c’est à dire le plus souvent possible, mais on ne se fait pas d’illusion).

Homme dans un tunnel

«T’es pas tout seul, tu sais.»

Elle lui dit ça pour le rassurer, parce qu’elle le sent tendu. Il le sait, mais c’est plus fort que lui: la remarque sonne comme un reproche. Il se verse un autre verre de vin en tentant de se raisonner. Elle ne sait pas. Elle ne peut pas savoir. Il est toujours prudent. Il prend soin de justifier ses retards. Il enlève toujours la boue de ses chaussures avant de revenir à la maison. Et puis son travail est si intense! Il est constamment sollicité par ses collègues. Quand il rentre à la maison, on dirait que les enfants le font exprès et se chamaillent avec plus d’intensité. Leurs cris lui donnent mal à la tête. Il doit se retenir pour ne pas hurler plus fort qu’eux.

Ça lui a pris tout d’un coup, il y a quelques semaines. Il s’est levé de sa place à l’arrière du bus et a sonné pour demander l’arrêt. Le chauffeur, habitué de le voir descendre près de chez lui, l’a regardé s’éloigner d’un air confus.

Un petit détour de rien, une marche prolongée, un répit entre le travail et la maison. Les jours commençaient à être plus longs et c’était agréable de passer du temps au grand air. Le lendemain, il est descendu un arrêt plus tôt. Le surlendemain, ce fut un autre arrêt encore plus distant. Maintenant, plusieurs jours par semaine, il quitte le travail tôt, sans prévenir personne.

Le détour lui a fait découvrir un boisé dont il ne connaissait pas l’existence. Les sentiers étroits permettent de déambuler longtemps, à bonne distance des maisons de sa banlieue. Un grondement sourd provient de l’autoroute avoisinante, mais dans cet endroit, le son a une tonalité agréable. Quelque chose d’étouffé et d’enveloppant, comme s’il était au fond d’un lac. Dans le tunnel qui passe sous la rue, ça sent le métal, la bière et l’humidité. Des pistes de cerf et des traces de pas marquent la boue. T’es pas tout seul.

Il n’a pourtant encore croisé ni animal, ni humain.

Ça le réjouit.

Un jour, bientôt, il le sait; il ne rentrera pas à la maison.

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